Chère Hélène Petite, 

Je te disais par boutade lors de notre rencontre au BPS22 que ton travail me semblait être une étude sur l'exotisme. 
« Discutable » aurait argué un témoin imaginaire de notre conversation. En effet, pas de palmiers à l'horizon, ni d'oiseaux multicolores, ni de chutes du Niagara dans tes délicates photographies. Néanmoins, je persiste et signe : tes images parlent de l'exotisme du 21e siècle qui, comme l'avait prophétisé Marcel Proust, ne s'écrit plus à l'échelle de voyages lointains, mais bien d'une chambre. Etant entendu que chez toi, ce sera autant la chambre photographique dans laquelle on compose l'image que tout territoire de proximité qui te sera donné d'arpenter et dans lequel tu trouveras matière à ta recherche d'absolu. L'exotisme aujourd'hui commence au fond de la rue, au coin du bois. Il n'est plus extérieur, il est intérieur. Cette quête de l'exotisme est d'autant plus forte chez toi que, justement, tu ôtes ses signes stéréotypés. Tu ne conserves que ce qui reste, en l'occurrence la vie sauvage, qui est plutôt dans l'entremêlement que dans la distinction. Tu portraitures une altérité en écosystème, fait de subtiles interactions essentiellement invisibles à l'oeil nu. L'exotisme d'autrefois n'était pas fait d'un regard sur l'écosystème. Il était fait d'un regard sur des trophées qui en étaient tirés arbitrairement. Ta quête intérieure se manifeste encore dans ton jeu sur les tirages photographiques passant subrepticement (et non spectaculairement) d'un papier ou d'un mode d'accrochage à l'autre. Il en résulte un univers facetté. Enfin, elle s'exprime dans tes compositions favorisant un rectangle dont les quatre bords ouvrent à d'autres dimensions, sans que l'une ne domine l'autre, comme auparavant. Ce qui engendre une totale et fertile indécision géographique. 


Yoann Van Parys
Lettres de misarchie 
BPS22, 2021


Dear Hélène Petite,

I was joking with you when we met at the BPS22 that your work seemed to me to be a study in exoticism. « Debatable ! » an imaginary witness to our conversation would have argued. Indeed, no palm trees on the horizon, no multi-coloured birds, no Niagara Falls in your delicate photographs. Nevertheless, I persist and sign off : your images speak of the exoticism of the 21st century, which, as Marcel Proust prophesied, is no longer written on a scale of distant journeys but in terms of a room. Seeing as in your home, it would be as much the photography room in which the image is composed as any loca area given to you to roam and in which you will find the matter for your search of the absolute. Nowadays, exoticism starts at the end of the street, at the corner of the woods. It is no longer outside ; it is inside. This quest for exoticism is all the stronger with you, precisely because you remove its stereotypical signs. You only keep that which remains ; in this case, the wildlife, which is more about intermingling than distinguishing. You portray an otherness in an ecosystem made up of subtle interactions essentially invisible to the naked eye. In the past, exoticism was not about looking at the ecosystem. It was made from a look at trophies that were arbitrarily extracted from it. Your inner quest is also reflected in your play with photographic prints, moving surreptitiously (and not spectaculary) from one paper or hanging method to another. A multi-faceted approach. Finally, it is expressed in your compositions favouring a rectangle of which the four edges open up to other dimensions, without one dominating the other, as in the past. This leads to a total and fertile geographical indecision.



L’île au sable